Le Ramadan et la surcharge religieuse .Par Dr Ahmed Khalifa Niasse
Le Ramadan et la surcharge religieuse .Par Dr Ahmed Khalifa Niasse
Notre pays, le Sénégal, est certainement celui des exagérations et des surcharges inutiles. Comme dans les transports où l’on voit un camion supporter l’équivalent de trois charges réglementaires.
Ce phénomène s’étend aux prisons, aux hôpitaux…Jusqu’aux manifestations religieuses. Là le nombre de Gamous, de Magal, de Ziaar dépasse le nombre des jours de l’année. Plus de 365( trois cent soixante cinq ) par an!
Lorsque la famille s’agrandit par l’arrivée d’un nouveau né, plutôt que de lui donner le prénom et le circoncire le même jour on attend huit jours. Et quelques fois même on reporte après le huitième jour à plusieurs mois. Il y en a qui vont le porter jusqu’à quatre ans ou au-delà.
Dans le pèlerinage à la Mecque il y a des exagérations sénégalaises . Surtout dans celui des femmes. On leur recommande d’avoir un couteau avec elles comme dans le cas des circoncis ( ndioulis).
Au Sénégal rien n’est simple. Tout doit être exagéré pour mériter d’exister.
Le vendredi on voit des gens barrer des rues pour y prier. Bloquant, ainsi , la circulation. Or, prier sur les voies publiques est formellement interdit en Islam comme l’a prononcé le Prophète ( psl) dans plusieurs hadiths attestés .
À l’occasion de la Tabaski dans une famille pauvre où cohabitent trois épouses le quidam peut être obligé d’amener trois moutons à ses femmes en plus du sien propre. Ce sera, alors, l’occasion de voir lequel des béliers des épouses est le plus gras, le plus fort ou le plus agressif…..
Ce challenge continue dans le pèlerinage. Or, le deuxième pilier le plus important dans l’islam( la zakat) personne n’en parle.
Au Sénégal presque personne ne sort la zakat qui est utile pour l’équilibre social. Parce qu’il n’y a pas ce m’as tu vu dans cette pratique.
De pauvres gens vont à la Mecque, dépensant pas moins de cinq millions par snobisme.
Beaucoup considèrent que pendant le Ramadan le plus important ce n’est pas le jeûne ( qui est une obligation) mais la Nafila (qui est une prière surérogatoire). La Nafila est même une création après le Prophète (Psl).
Le Prophète (Psl) n’a jamais pratiqué ces Nafila codifiés, normés…Avec quatre, huit ou douze rakkas. Mais il y a un marché en filigrane dans ces Nafila. Les imams des Nafila sont souvent des rançonneurs. Ils vont, après, dans les maisons pour dire aux fidéles qu’ils ont une bonne pratique de la religion, qu’ils sont toujours à la mosquée…
Il leur arrive, même, d’organiser des anniversaires pour les défunts. Alors que l’anniversaire c’est quand même pour des gens qui peuvent manger un gâteau !
L’anniversaire des morts est une nouvelle création. C’est une surcharge. Et les fidèles vont jusqu’à croire que leurs parents morts n’iront au paradis que si on leur organise un anniversaire dans ces formes. Des Kamils à la clé, des fidaws…
Tout cela ne constitue que des exagérations dans la religion. Et tout ce qui est exagéré devient futile. Le Coran a dit: » N’exagèrez pas dans la religion « .
Le Sénégal est le pays de l’exagération.
Quelqu’un peut vous dire qu’il n’a pas jeûné parce qu’il n’a pas fait la grande ablution après des rapports sexuels avec sa femme la nuit passée. Or, le jeûne n’a rien à voir ni avec la prière, ni avec les ablutions, ni avec la Nafila. Tout cela ce sont des exagérations.
Il y a une mafia de la religion qui encaisse à ces occasions là.
Lorsqu’il y a un défunt les gens se disputent la primauté de lire le Coran. À cause de l’enveloppe qui sera donnée après. Les uns voudront écarter les autres parce que si le nombre de personnes qui se partageront l’enveloppe est est important la part de chacun se rétrécit.
Quand une famille est affligée par la disparition d’un être cher on lui demande d’acheter des parfums spéciaux, venant de la Mecque qu’on vend au prix fort. Idem pour les linceuls. Sans compter les imams et autres religieux qui voudraient avoir la primauté pour la prière funèbre. L’appartenance à la confrérie, le marabout et autres détails entrent en jeu.
À chaque fois que vous allez prier dans une mosquée le vendredi vous assistez à une quête qui, en réalité, retourne à l’imam.
Je me rappelle une mosquée dans un quartier populaire qui avait été démolie par les pluies diluviennes. Les responsables se sont adressés à moi, entre autres. Je les ai mis en rapport avec mon architecte pour une prise en charge complète de la reconstruction de ladite mosquée. Ils ont décliné l’offre en disant qu’ils veulent un financement en espèces. Ce qui, en filigrane, permettrait des malversations qui leur profiteraient. Eux les responsables de la mosquée. Mieux, ils ont demandé qu’on leur construise une morgue avant l’achèvement de la mosquée. Parce que la morgue est plus rentable. Ils la louent aux familles des morts avant d’organiser la prière et l’enterrement. Il y a même une concurrence au niveau des mosquées pour la location des morgues.
Souvent, les familles veulent que leurs enfants puissent mémoriser le Coran avant de commencer l’école. Ainsi, ils leur font perdre des fois entre trois et cinq ans du temps qu’ils devraient passer à l’école. Or ce temps pour la mémorisation du Coran devrait simplement être intégré aux journées normales. Soit une heure par jour, deux heures les week-ends et plus pendant les grandes vacances. Mais là, encore, exagération…
Nous pensons qu’il y a un chiffre d’affaires estimé entre trois cents et cinq cents milliards qu’il faudra corriger. C’est le chiffre d’affaires de la religion musulmane au Sénégal.
À savoir les Gamous, les Magal, les Ziaars, les Daakaas, les Halwars…Sans compter la partie invisible, c’est-à-dire le charlatanisme habillé d’un voile religieux.
Si vous souhaitez être ministre, directeur…Pour ne pas être emprisonné, pour un retour d’affection, pour la réussite des enfants à l’école ou aux examens…
Des fois c’est pour l’obtention d’un visa ou autres avantages. Autant de fardeaux qui empêchent le Sénégal d’avancer. Parce souvent ce chiffre d’affaires religieux grève souvent le budget familial. Un déséquilibre aux innombrables conséquences.
Les politiciens sont les principaux fagots qui alimentent indument ce foyer. Tous veulent pouvoir justifier leur présence auprès des marabouts, des dahiras et des mosquées de quartiers.
Il arrive que d’anciens gendarmes, d’anciens policiers, d’anciens tortionnaires deviennent Imams. Non pas par leur érudition mais par défaut. Il y en a qui pour se faire une réputation ne tardent aucune prière. Ils sont souvent des pourvoyeurs de fonds. Ce serait presque un crime que de ne pas dénoncer cela.
Aujourd’hui il y a toute une partie de la société, surtout les jeunes, qui sont en marge de la religion sociale. Même s’ils sont acceptés par Dieu. Les mettre en marge de la sphère des « imposables » de la religion en fait des parias. Or ils n’en sont pas.
Un jeune qui se coiffe d’une certaine manière n’a fait que ranger les cheveux en épousant la mode. Et on en fait un apostat ! Sans compter les filles auxquelles on a refusé les maris du coeur pour les donner aux maris de la poche. Et qui quelques fois commettent ce qui peut être considéré comme adultère à cause des pesanteurs de la société. Et lorsqu’on leur montre qu’il y a un autre islam, l’islam du Prophète ( psl), qui est simple, compréhensible et humain on leur dit que c’est le côté laxiste de la religion.
Dans le Coran un verset dit au Prophète ( psl): » Penches-toi toujours du côté des facilitateurs, ne sois pas un dictateur ».
La religion n’est pas un diktat. L’islam ne l’est pas. C’est ça que chaque musulman doit comprendre.
Le musulman n’est dans l’obligation d’adorer personne en dehors de Dieu. Même le Prophète (Psl) ne doit pas faire l’objet d’adoration. À fortiori les quelques familles qui se sont arrogées le monopole de la religion au nom de leurs ancêtres. Comme si au Sénégal après avoir embrassé l’islam on devrait faire un retour aux sources des ancêtres.
Aujourd’hui un marabout ne devient saint que s’il est Mame Untel( l’ancêtre). D’ailleurs si Imam impose un certain respect c’est parce que dire Mame ou Imam c’est phonétiquement presque pareil.
Nous sommes dans la religion du Mamisme ( le culte des ancêtres). Au nom des ancêtres on a mâtiné la religion de corps étrangers. Et on en a trop mis. Et trop c’est trop.
Doit-on évoquer des contrées entières à l’intérieur du pays et qui appartiennent au marabout de service ? Lorsque de simples citoyens viennent et édifient des immeubles sur des terrains se situant dans ces no man’s lands ils le font à leurs risques et périls, sans aucun droit. Et certains appartenant à la filiation maraboutique se permettent quelques fois, purement et simplement, en violation de toutes les réglés de l’islam, de faire main basse sur ces logements. Et, même, quelques fois , les filles ou les jeunes épouses des spoliés. Même à Médine, la cité du Prophète (psl) les propriétaires sont des propriétaires. Ils ont leurs titres fonciers. Ils ne les ont ni au nom du Prophète (psl), ni aux noms des Sahabas. Il en est de même à la Mecque, à Rome, à Lhassa, à Canterbury (Londres) ou Amritsar chez les Sikhs.
Partout dans les sièges des religieux on est propriétaire de son édifice.
Au Sénégal on a érigé des exceptions et créé des Zones de non droit. La loi sénégalaise n’est quelques fois pas appliquée dans ces foyers là. La où il n’y a pas le droit il n’y a pas la loi. Il se trouve aussi que la loi électorale n’est pas universelle au Sénégal. Il y a des contrées où on peut dire que la femme n’a pas le droit au vote. On peut aussi expulser des gens de leurs propres maisons et les bannir de la cité gérée par le marabout de service.
On en a vu dans ce pays là.
La religion du Prophète (Psl) qui est une religion de la simplicité et du retour à Dieu de tous les mortels est devenu le plus grand cartel qui empêche le Sénégal d’aller à l’avant.
Au Sénégal il y a bien un esclavagisme religieux et qui dit son nom. Parce vous devez vous identifier par votre marabout. Quelques fois les gens affichent sur leurs poitrines les photos de leurs marabouts comme si c’était un signe d’esclavage accepté et même proclamé.
Lorsque le Sénégal se libérera du joug des surcharges religieuses il fera bon y vivre.
Dr Ahmed Khalifa Niasse