Briser les ronds-points de l’économie : pour une administration militante de l’initiative .Par Dr Jules Charles KEBE*
Dr Jules Charles KEBE partage un contribution titrée "Briser les ronds-points de l’économie : pour une administration militante de l’initiative"

Dr Jules Charles KEBE partage un contribution titrée « Briser les ronds-points de l’économie : pour une administration militante de l’initiative », publiée notamment par le quotidien national Le Soleil ce vendredi 8 août.
Dans le texte que nous reprenons en intégralité ci-dessous, le DG DUOPHARM SA y relate des paramètres importants pour asseoir notre essor économique.
Le texte de Dr Jules Charles KEBE
Dans un contexte rampant de morosité économique, où l’attentisme et une certaine lassitude collective semblent s’installer dans les esprits et les décisions, le Sénégal se cherche un nouveau souffle.
Le Plan de Redressement Économique et Social 2025-2028 (PRES) récemment annoncé par le Premier Ministre Ousmane SONKO ouvre une brèche : celle d’un sursaut national, d’un réveil des énergies créatrices afin de redresser notre économie sans recourir à l’endettement extérieur. Mais encore faut-il que les institutions et les pratiques suivent !
Ce que nous observons, ce n’est pas le manque de talents, d’idées ou d’ambition qui bride notre pays, c’est autre chose de plus diffus, plus insidieux : c’est l’inertie administrative, les lenteurs réglementaires, la bureaucratie qui, jour après jour, étrangle l’élan et l’envie des entrepreneurs, jeunes diplômés, agriculteurs, commerçants et autres porteurs de projets.
Dans de nombreux pays, un rond-point est un outil d’accélération et de fluidité. Au Sénégal, c’est plutôt un nœud d’embouteillages…
J’ai souvent illustré cette situation par une métaphore que j’ai nommé « la théorie des ronds-points ». Dans de nombreux pays, un rond-point est un outil d’accélération et de fluidité. Au Sénégal, c’est plutôt un nœud d’embouteillages, de congestion, de chaos parfois où tout est au ralenti.
On y retrouve tout… sauf ce qui permet d’avancer. Je trouve par ailleurs, que ceux de la capitale sont surdimensionnés et se dressent comme des obstacles à la mobilité plutôt que comme des facilitateurs.
Le rond-point devient alors l’image de notre modèle économique bloqué : beaucoup d’agitation mais peu de valeur ajoutée, beaucoup de micro-activités mais peu de productivité réelle.
La question est donc simple : comment libérer les énergies créatrices dans ce contexte ? La réponse tient en un mot : la fluidité. Dans les démarches, dans les décisions, dans l’accès aux pièces administratives, à la bonne information, aux autorisations, etc. Tout ce qui constitue les services de l’État et tout ce qui transforme un État en moteur du développement.
Les entrepreneurs ont longtemps plaidé pour une administration militante de l’initiative économique.
Ce dont le Sénégal a besoin en effet, ce n’est point d’un miracle extérieur, mais d’un choc de simplification et de facilitation.
Cela passe par la réduction drastique des délais de délivrance des autorisations, par la numérisation massive des démarches administratives, la suppression des autorisations à multiples niveaux qui aboutissent à de la confusion et enfin par la responsabilisation des services administratifs dont la performance sera mesurée par les usagers.
Il faut briser les chaînes invisibles qui enserrent les porteurs de projets, les investisseurs locaux ou de la diaspora, et ceux que nous appelons injustement « les petits métiers » qui souhaitent sortir de l’informel et se heurtent à un labyrinthe administratif.
Une économie ne se redresse pas uniquement par les milliards du budget ou par les grandes réformes économiques
Chaque jour perdu pour un dossier est un emploi non créé, une taxe non perçue, un produit non distribué. Une économie ne se redresse pas uniquement par les milliards du budget ou par les grandes réformes économiques ; elle se redresse aussi par la multiplication des opportunités et l’efficacité des services publics.
Le temps est venu d’un consensus national autour de cette simplification d’autant qu’une proportion importante de la population active est toujours analphabète. Ceci n’est pas une revendication de la corporation des pharmaciens à laquelle j’appartiens, c’est une urgence collective.
L’Agenda de transformation des services publics présenté le 04 août dernier par le ministre de la Fonction Publique suscite des espoirs. Nous le percevons comme un prérequis, une condition sine qua none qui fera de notre Administration le terreau de la transformation de notre économie.
Il ne s’agit pas de plaider pour moins de contrôles et de régulation, prérogatives régaliennes incontestables de l’État et de son administration, mais plutôt de réorienter sa logique vers l’appui à la création de valeur, la confiance envers les porteurs de projets, l’incitation à l’investissement et à l’innovation.
Les solutions sont connues : allégement des procédures, transparence, adoption d’outils numériques, mise en place de guichets uniques efficaces, dématérialisation des démarches, formation continue des agents des services publics à la culture du service.
Ce chantier est aussi technologique. L’arrivée de l’intelligence artificielle rebat les cartes. La nouvelle génération, celle du numérique, mérite que la transformation technologique à portée de nos jeunes soit accompagnée par celle des esprits de ceux qui décident d’un destin en un coup de signature et de visa apposé sur un document.
Le moment est venu de sortir des ronds-points administratifs qui nous font tourner en rond. Le Sénégal mérite d’avancer, vite, droit et fort. Cela commence par un État qui croit en sa population et qui lui ouvre la voie.
Le PRES 2025-2028 doit être le cadre de cette bascule vers un développement enfin devenu endogène. Notre avenir dépendra de notre capacité à changer le rythme de cette transformation. A l’État de libérer les flux. Aux citoyens de libérer leur énergie.
*DG DUOPHARM SA